Argentine : un ex-policier de la dictature, extradé de France, condamné à 15 ans de prison

Jeudi 22 décembre 2022

Argentine : un ex-policier de la dictature, extradé de France, condamné à 15 ans de prison

Agence France-Presse 21 décembre 2022 à 21h38

L’ancien policier argentin Mario Sandoval, soupçonné d’avoir participé à des centaines d’enlèvements, tortures et disparitions sous la dictature (1976-1983) et extradé de France en 2019 au terme d’un long exil, a été condamné mercredi à quinze ans de prison, pour la disparition d’un étudiant en 1976.

Mario Sandoval, 69 ans, a été reconnu coupable de « privation illégitime de liberté » et « d’imposition de tortures à un détenu politique » : Hernan Abriata, étudiant en architecture et militant péroniste de 24 ans, enlevé en octobre 1976, et disparu depuis, selon le jugement d’un tribunal de Buenos Aires, dont des extraits ont été publiés par l’agence officielle Telam.

Ancien inspecteur de police fédérale à Buenos Aires, Mario Sandoval a comparu en septembre, jugé pour le seul dossier d’Abrieta, bien qu’il soit soupçonné d’avoir été l’un des agents les plus actifs de l’ESMA, l’Ecole de mécanique de la Marine, dont une aile devint le centre de détention et de torture le plus tristement célèbre de la dictature.

Il a été extradé de France en décembre 2019, après huit ans de bataille judiciaire, avec des recours devant le Conseil d’Etat et le Conseil constitutionnel notamment, et placé depuis en détention préventive en Argentine.

Des peines de vingt ans de prison à la réclusion à perpétuité avaient été réclamés par le ministère public, et les parties civiles, parmi lesquelles la famille d’Hernan Abriata, le secrétariat des Droits de l’Homme et des survivants de l’ESMA.

Mario Sandoval a entendu l’énoncé de la sentence, par téléconférence, depuis sa cellule de la prison militaire de Campo de Mayo.

Auparavant, il avait une dernière fois clamé son innocence, et affirmé n’avoir rien eu à voir avec l’ESMA. Comme au début du procès lorsque, défiant, il s’était qualifié de « prisonnier d’exception », victime d’un « procès politique », pour lui faire « porter la responsabilité politique de la violence de cette époque »

« A ce procès, ma liberté et ma réputation ont été mises en danger. Par moments, la Cour est devenue une scène, où les discours étaient politiques et je ne pouvais pas me défendre », a-t-il lancé mercredi.

Exilé en France en 1985, après la chute de la junte, Mario Sandoval s’y était bâti une nouvelle vie, devenant consultant sur les questions de défense et de sécurité. Il avait enseigné notamment à l’Institut des hautes études de l’Amérique latine (IHEAL), à Paris.

Il avait obtenu la nationalité française en 1997 mais, n’étant pas Français à l’époque des faits, pouvait être extradé. Il avait été débusqué à la suite d’un article de presse, et via une étudiante, fille d’exilés argentins, qui avait suivi un de ses cours à la Sorbonne. D’ex-détenus l’avaient reconnu d’après des photos.

Depuis la reprise en 2006 des procès de la dictature, après plus d’une décennie de mesures et lois d’amnistie hautement controversées, plus de 1.110 personnes ont été condamnées pour crimes contre l’Humanité. La dictature a fait, selon les ONG, quelque 30.000 morts ou disparus.

Des procédures restent en cours contre plus de 600 autres, soit au stade de procès, soit encore à l’instruction, selon le parquet spécialisé.

Agence France-Presse

Revenir en haut