Agence France-Presse 3 octobre 2023 à 13h45
L’ampleur de l’enquête a révélé des failles potentielles dans les lois anti-blanchiment de la ville-Etat, que les mafias pourraient exploiter, ce qui a suscité des questions au Parlement sur les raisons pour lesquelles elles n’ont pas été détectées plus tôt.
« Cette affaire nous rappelle que même les mesures préventives les plus strictes peuvent être contournées par des criminels déterminés », a déclaré la ministre de l’Intérieur Joséphine Teo dans un discours aux parlementaires.
Les autorités ont saisi et gelé des actifs d’une valeur de plus de 2,8 milliards de dollars de Singapour (2,04 milliards de dollars) dans une série de raids menés depuis août contre le réseau international de blanchiment d’argent suspecté, a annoncé Mme Teo.
La police a arrêté 10 ressortissants étrangers — de Chine, de Turquie, du Cambodge, de Chypre et de Vanuatu — accusés d’être membres du réseau soupçonnés de blanchir des produits d’activités criminelles à l’étranger, notamment des escroqueries et jeux d’argent en ligne.
Tous les 10 sont originaires de Chine. D’autres arrestations et saisies sont attendues alors que la police poursuit son enquête, a déclaré Mme Teo.
Le mois dernier, la police singapourienne a déclaré avoir saisi et gelé plus de 1,76 milliard de dollars d’actifs lors de raids de grande envergure, mais ceux-ci ont depuis augmenté de centaines de millions.
Selon Mme Téo, la dernière saisie a inclu 152 propriétés, 62 véhicules, des milliers de bouteilles d’alcool et de vin, de l’argent, des crypto-monnaies, des lingots d’or, des sacs et des montres de luxe et des bijoux de valeur.
La police a d’abord reçu des « informations disparates » sur des transactions suspectes en 2021, y compris l’utilisation de documents présumés falsifiés pour se procurer des fonds, et a commencé à mener des descentes après avoir recueilli beaucoup plus de preuves, a-t-elle déclaré.
Cetta affaire de blanchiment d’argent est « probablement » l’une des plus grosses au monde, a expliqué Mme Teo aux députés. En moyenne, 43.000 transactions suspectes ont été signalées chaque année à Singapour entre 2020 et 2022, soit plus de 150 par jour ouvrable, a-t-elle déclaré.
Elle a par ailleurs qualifié de « complètement fausses » les informations voulant que la Chine ait fait pression sur Singapour pour résoudre l’affaire.
Singapour est un centre financier mondial et dispose de lois strictes contre le blanchiment de fonds illicites, passible de peines de prison allant jusqu’à 10 ans.
Le deuxième ministre des Finances, Indranee Rajah, a annoncé un comité interministériel, afin de rester « à jour » pour faire face à une « criminalité de plus en plus sophistiquée ».
Alvin Tan, ministre d’État au Commerce, a déclaré que certains des accusés étaient peut-être liés à des « family offices » (bureaux de gestion familiale) — des entités qui gèrent les actifs contrôlant une famille — qui ont reçu des incitations fiscales.
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