Agence France-Presse 10 mars 2025 à 19h50
L’Institut ouïghour d’Europe a annoncé avoir déposé lundi une nouvelle plainte contre X visant la « répression » menée selon lui par les autorités chinoises à l’égard de la diaspora ouïghoure en France, dénonçant la « complaisance » des autorités judiciaires françaises, restées muettes en dépit d’une première plainte le 24 mai dernier.
« Depuis cette date, les intimidations contre les membres de la diaspora continuent et produisent des effets désastreux sur leur santé », a affirmé l’Institut ouïghour d’Europe (IODE) devant la presse, citant notamment le cas de Mme Gulbahar Jalilova, victime d’une « tentative d’enlèvement » à Paris le 8 mai 2024.
Cette militante ouïghoure a depuis dû séjourner six mois en hôpital psychiatrique, a rapporté Marine Mazel au nom de l’IODE. « Son adresse est désormais connue et elle n’est pas protégée », a-t-elle ajouté.
Le journal Le Monde avait en mai dernier fait état de notes de la Direction générale de la sécurité intérieure « qui révèlent la présence de fonctionnaires d’Etat appartenant aux services chinois lors (…) d’une "action d’intimidation" avortée, le 8 mai, à l’encontre d’une réfugiée politique d’origine ouïghoure ». Cet incident serait en partie à l’origine d’une discrète demande de Paris pour obtenir le départ du sol français du chef de poste des services secrets chinois et de son adjoint, basés à l’ambassade de Chine, selon Le Monde.
L’ambassade de Chine en France avait fustigé « une narration truffée d’erreurs » à propos des informations du Monde. Contactée par l’AFP, elle n’avait pas réagi lundi soir.
La plainte avec constitution de partie civile rend automatique l’ouverture d’une information judiciaire. « Il y a eu un silence totalement assourdissant de la justice, qui n’a même pas accusé réception » de la plainte initiale, a déploré l’avocat de l’IODE, Me Jérôme Karsenti.
En revanche, la présidente de l’IODE, Dilnur Reyhan, a annoncé qu’elle comparaîtrait mercredi au tribunal correctionnel d’Evry pour « dégradation de biens » et « agression sur des personnes », pour avoir jeté de la peinture rouge sur un kakémono de l’ambassade de Chine pour en dénoncer la présence lors d’une fête de l’Humanité en 2022.
« Je trouve inacceptable que ce soit moi qui me retrouve devant un tribunal, et non pas les représentants de l’Etat » chinois, a déclaré Mme Reyhan, qui est devenue Française il y a dix ans.
La plainte vise « des infractions de génocide et de harcèlement moral », précise l’association.
Les Ouïghours, des musulmans sunnites, représentent le principal groupe ethnique du Xinjiang (nord-ouest de la Chine).
Depuis 2017, plus d’un million de Ouïghours ou de membres d’autres groupes ethniques, principalement musulmans, ont été internés dans des « camps » de « rééducation » où les violations des droits de l’Homme sont nombreuses, affirment des études et des ONG occidentales.
La Chine présente une partie de ces infrastructures comme des « centres de formation professionnelle ».
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