L’ex-conservateur de la BNF nie le vol du H52
Après l’angoissant H5N1, voici le mystérieux H52. Un nouveau virus ? Pas du tout. Derrière cette cote qui le référence à la Bibliothèque nationale de France (BNF), on découvre un manuscrit hébraïque exceptionnel, rare, d’une valeur inestimable, qui fut volé, vendu et retrouvé. L’audience de cet après-midi au tribunal correctionnel de Paris attirera donc historiens, universitaires, experts du marché de l’art, et agents de la BNF. Michel Garel, ancien et très respecté conservateur des manuscrits hébraïques de la Bibliothèque nationale de France, y sera jugé pour « vol commis avec dégradation par personne chargée d’une mission de service public ».
En clair, Michel Garel, 58 ans, est accusé d’avoir vendu le manuscrit H52 à David Sofer, un collectionneur londonien qui le met directement en cause sans pour autant apporter de justificatif prouvant la transaction. Ce même Sofer a ensuite mis en vente le document chez Christie’s, à Londres, en 2000. Maquillé, changé, amputé d’une soixantaine de pages, il est alors cédé pour 300 000 euos sans que les experts identifient l’écrit. Pour qu’il soit vendu à l’étranger et puisse donc sortir du territoire national, Michel Garel a toutefois dû signer un bordereau demandant l’autorisation au ministère de la Culture, obligatoire pour ce type de document. Une signature qui le compromet fortement.
« Mais pourquoi aurait-il laissé une trace aussi évidente du délit ? s’interroge son avocat, Lef Forster. S’il avait voulu passer par des circuits parallèles, il serait allé jusqu’au bout. » Michel Garel prétend que c’est Edmond Safra, un banquier milliardaire en qui Garel avait toute confiance, qui lui aurait demandé de signer l’autorisation, uniquement sur la foi de photographies. « Ces photos ne permettaient pas d’identifier le H52, et Michel Garel n’avait aucune raison de se méfier de quoi que ce soit », assure Me Forster. Depuis, Safra est mort à Monaco dans des conditions mystérieuses. Et le document, revendu, n’a ensuite été repéré par un expert que quelques années plus tard. « C’est improbable que les experts de chez Christie’s ne l’aient pas authentifié », estiment les soutiens de Michel Garel, parmi lesquels de nombreux anciens collègues qui se répandent sur Internet.
Toujours est-il qu’au moment de la vente supposée du manuscrit par Garel, un compte de ce dernier situé au Luxembourg a été largement alimenté. « Par des ventes personnelles de manuscrits achetés en Europe de l’Est », plaide l’ancien conservateur. Mais ce n’est pas tout : une universitaire israélienne prétend que Garel lui aurait avoué le vol. « Jalousies », balaie son avocat. La BNF dit, elle, n’avoir « aucun doute » sur la culpabilité du conservateur. D’autant que Garel avait déjà avoué le vol lors d’un interrogatoire. « Mais seulement pour échapper à la détention provisoire », se défend-il. Le tribunal en jugera.
Michaël Hajdenberg
©2006 20 minutes
20 Minutes, éditions du 03/03/2006 - 00h15
dernière mise à jour : 03/03/2006 - 10h25
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