« Ça fait beaucoup de coïncidences… » : au procès libyen, l’étrange vente des deux tableaux de Claude Guéant et le coffre-fort d’Alexandre Djouhri

Dimanche 23 février 2025

Pendant deux jours, le tribunal correctionnel de Paris a décortiqué la vente, largement surévaluée selon des experts, pour 500 000 euros de deux tableaux ayant appartenu à l’ancien secrétaire général de l’Elysée. Le circuit financier pourrait être en lien avec de l’argent libyen.

Par Violette Lazard

Publié le 20 février 2025 à 18h56, mis à jour le 20 février 2025 à 19h20

[…] Séduit par les marines flamandes, Me Rajendram lui propose alors de les acquérir pour un de ses clients au prix faramineux de 500 000 euros. « Monsieur Rajendram a fait une proposition à la fin de l’année, et je dois dire que je n’ai pas cherché à faire une évaluation de cette proposition, je ne suis pas, par fonction ou par goût, un marchand. J’ai trouvé que c’était satisfaisant et j’ai accepté », commente Guéant. D’autant que cette somme arrive à point nommé : les 500 000 euros, versés en mars 2008, lui ont permis par la suite d’acquérir un appartement dans le 16e arrondissement de Paris sans effectuer de crédit.

Expertise judiciaire

Les incohérences relevées au cours de l’enquête ne troublent en rien le récit du « Cardinal », son surnom du temps de la sarkozie triomphante. L’ambassadrice de Malaisie n’était plus en poste en 2007 et ne se souvient d’aucun dîner ? Claude Guéant ne se l’explique pas. L’avocat malaisien, après avoir tenté d’éviter les magistrats français, a indiqué au cours de l’instruction que c’est Guéant lui-même qui a exigé 500 000 euros ? « C’est bien lui qui a fixé le prix et pas moi. » Comment expliquer la différence entre le montant estimé par l’expert judiciaire – entre 30 000 et 35 000 euros – et la somme versée par l’avocat malaisien ? « Dans un article de presse, il est mentionné qu’un des tableaux de ce peintre s’est vendu à plus d’un million d’euros », ne se démonte pas Claude Guéant, dont les conseils n’ont pourtant jamais demandé de contre-expertise judiciaire des œuvres.

Alexandre Djouhri regarde calmement son ancien ami se débattre à la barre. Ce sera bientôt son tour de venir répondre aux questions. En remontant la piste des 500 000 euros, l’enquête a en effet montré que le compte de l’avocat malaisien n’était qu’une étape. Ce même compte avait été abondé de la même somme deux jours auparavant par le Saoudien Khaled Bugshan. Celui-ci a reçu deux ans plus tard cette même somme, agrémentée de 100 000 euros supplémentaires, de la part d’Alexandre Djouhri.

Un « remboursement » selon l’accusation, et un lien possible avec l’argent libyen : les mêmes comptes, les mêmes acteurs, le même circuit financier emprunté pour permettre à l’argentier du régime libyen, Bechir Saleh, et son fonds souverain, le Libya Africa Investment Portfolio (LAP), d’acquérir une villa à Mougins (Alpes-Maritimes) appartenant à Alexandre Djouhri – ce que conteste ce dernier. Les sommes avaient également transité sur les comptes de Bugshan, de l’avocat malaisien et d’Alexandre Djouhri. Lire la suite.

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