La CNUCED veut un registre financier mondial

Vendredi 15 septembre 2017

La CNUCED veut un registre financier mondial

Dans son rapport publié jeudi à Genève, la CNUCED appelle à une politique industrielle numérique pour que la robotisation ne menace pas les pays en développement.

Un fort endettement mondial et une faible demande ont « eu pour effet d’empêcher la croissance soutenue », estime le secrétaire général de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement (CNUCED) Mukhisa Kituyi. La dette dans les secteurs non financiers a notamment atteint en 2016 un record de 230% du produit intérieur brut (PIB).

« Le fossé se creuse entre entre ceux qui détiennent des actifs financiers et les autres », déplore de son côté le directeur pour la mondialisation et le développement à la CNUCED, Richard Kozul-Wright. Et de dénoncer « l’obsession des rendements à court terme ». Les autorités « doivent agir » pour faire de la concurrence un bien public, affirme M. Kituyi.

Selon le rapport, les excédents des principales entreprises non financières de 56 pays développés et en développement sont passés en 20 ans de 4 à 23% des bénéfices totaux.

Dans le cas des 100 premières sociétés, la part a même progressé de 19 à 40%. La différence de leur capitalisation boursière avec celle des 2000 dernières entreprises a été multipliée par plus de 20.

Arrivée de groupes de pays émergents

Conséquence de ce diagnostic, l’investissement diminue, les emplois se précarisent et la protection sociale s’affaiblit. La CNUCED appelle les Etats à sortir de l’austérité. D’autres solutions sont indispensables de manière « urgente », a dit devant la presse M. Kozul-Wright. Et l’institution dénonce l’évasion fiscale, la cession à bas prix d’actifs publics, les subventions aux grandes entreprises ou encore le rachat d’actions.

Malgré l’entrée sur le marché mondial des grandes entreprises de pays émergents, les sociétés des pays développés restent les principaux acteurs dans des secteurs à rentabilité élevée comme l’industrie pharmaceutique ou les technologies. Et le renforcement de la propriété intellectuelle contribue à cette situation, dit la CNUCED.

Selon elle, les ressources doivent être mobilisées pour l’emploi et l’investissement dans les infrastructures. Elle recommande aussi une adaptation aux changements climatiques, un accent sur les prestations de soins, un impôt progressif, un contrôle du capital financier ou l’amélioration de la capitalisation des banques de développement.

Mais elle propose surtout un registre financier mondial. Ce document rassemblerait les propriétaires d’actifs financiers dans le monde, une mesure « pas facile » à mettre en œuvre mais qui constituerait une étape pour mettre un terme à l’évasion fiscale, dit M. Kozul-Wright.

Il faudra « probablement » un mécanisme indépendant qui ne soit pas lancé par le Fonds monétaire international (FMI). La CNUCED relève par ailleurs que l’exclusion des femmes des bons emplois, renforcée par l’austérité, « aggrave l’inégalité générale ».

Croissance à 2,6%

De son côté, la robotisation pourrait offrir aussi bien des menaces que des opportunités, souligne M. Kituyi. Le rapport déplore que la numérisation ne concerne pas des emplois industriels mal payés comme dans l’habillement et que les pays en développement soient pénalisés.

Il faut garantir que la robotisation ne perturbe pas la répartition des revenus au profit des propriétaires de ces engins. La CNUCED est favorable à des revenus liés à la rentabilité de l’entreprise. Sans pour autant diminuer les droits travailleurs et la protection sociale.

Selon l’institution, la croissance mondiale devrait atteindre 2,6% en 2017. La plus forte reprise est attendue en Amérique latine, à 1,2%, alors que cette économie était en récession l’année dernière. Les pays de la zone euro devraient eux bénéficier de leur plus forte croissance depuis 2010, à 1,8%, mais rester derrière les Etats-Unis à plus de 2%.

Le commerce devrait progresser un peu grâce aux transactions sud-sud emmenées par la Chine. « Il y a toutefois beaucoup d’incertitude » surtout en raison de la chute des prix « des produits de base », relève encore la CNUCED.

Autre inquiétude, l’instabilité politique, l’augmentation des taux d’intérêt aux Etats-Unis et l’appréciation du dollar. Les entrées de capitaux dans les pays en développement restent par ailleurs négatives.

(ats/nxp)

Créé : 14.09.2017, 22h13

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