Entreprises : Compétitivité dans le pillage
Publié le 25 janvier 2015 (rédigé le 1er janvier 2015) par Thomas Noirot
La notion de compétitivité semble être devenue tellement sacrée dans le débat public, que les parlementaires en oublient le pillage qui la sous-tend immanquablement.
[…] Compétitivité des États : à quel prix ?
Le dumping fiscal illustré par l’affaire du Luxleaks (lire ci contre) ne se limite évidemment pas au Luxembourg, qu’il ne faudrait pas seul blâmer en oubliant les autres pays (y compris au sein de l’Union européenne, bien sûr), même si celui qui fut son Premier ministre pendant 19 années préside désormais aux destinées de la Commission Européenne. C’est la course vers le bas dans laquelle nous entraîne l’idée idiote de compétitivité des pays, en transposant encore une fois aux Etats un concept né dans le monde de l’entreprise : être fiscalement compétitif, pour attirer des investisseurs, quitte à atteindre une « fiscalité négative » par le biais de subventions et autres avantages offerts aux entreprises. Un « mythe » que démontent Nicholas Shaxson et John Christensen (de l’ONG britannique Tax Justice Network) dans leur rapport « The finance curse » de 2013, ainsi que l’excellent documentaire « Le prix à payer » (93 minutes) de Harold Crooks, qui sort fin janvier dans les (bons) cinémas français.
Nouvelle disparition du secret bancaire !
Les paradis fiscaux, qui sont au cœur des circuits de pillage de la Françafrique, ont en commun avec cette dernière l’annonce régulière de leur disparition. Fin octobre, la presse a ainsi annoncé avec fracas la fin du secret bancaire, suite à la réunion annuelle du Forum mondial sur la transparence et l’échange d’informations à des fins fiscales. La raison : une avancée sur le plan de l’échange automatique d’informations entre administrations fiscales des différents pays, une vieille revendication de la société civile pour permettre à chaque fisc de mieux traquer d’éventuels fraudeurs. Sur les 93 pays s’étant engagés à appliquer la norme d’échange d’informations élaborée sous l’égide de l’OCDE (l’organisation regroupant la trentaine de pays les plus riches), une cinquantaine d’Etats ont signé un accord dit multilatéral pour la mettre en œuvre. Mais, bien que prétendument « multilatéral », cet accord implique que les Etats parties choisissent les autres Etats avec lesquels ils vont échanger de l’information ; des zones d’ombre demeureront donc immanquablement dans ce maillage, certains pays ne souhaitant pas ou ne pouvant pas, faute d’un rapport de forces suffisant dans la négociation, échanger automatiquement ces informations avec tel ou tel autre. En outre cette norme, qui doit être ainsi mise en œuvre d’ici 2017, est suffisamment complexe pour noyer les administrations fiscales les moins bien armées, et pour offrir des parades légales que ne manqueront pas d’exploiter des avocats fiscalistes et leurs clients. Lire la suite sur le site de l’association Survie.