Bahamas papers : l’argent de l’aide au développement passe toujours par les paradis fiscaux
Le Vif 22/09/16 à 11:26 - Mise à jour à 12:32
Source : Knack
Quelque 116 sociétés offshore basées aux Bahamas et liées à la Belgique ont été identifiées par les membres du Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ) qui a publié des données concernant plus de 175.000 sociétés-écrans bahaméennes. L’ex-groupe belgo-français Dexia apparaît encore dans cette nouvelle affaire ainsi que la Société belge d’investissement pour les pays en développement et l’ancienne commissaire européenne à la concurrence Neelie Kroes.
Ces 116 sociétés sont gérées, détenues ou présidées par 92 Belges ou étrangers ayant une adresse en Belgique. Parmi eux, 54 occupaient toujours leurs fonctions après 2011. La plupart de ces 92 personnes sont les CEO de ces compagnies offshores. Ce sont des hommes d’affaires, des patrons, des personnes actives dans l’horeca, la logistique, le secteur financier ou encore la pétrochimie. Il y a aussi des avocats et un médecin précise Knack. La plupart seraient liés à une compagnie internationale célèbre, dont le nom sera révélé d’ici quelques jours.
Rappelons tout de même qu’il n’est pas illégal d’être le propriétaire ou le directeur d’une compagnie offshore. Tant que cela est signalé au fisc et que les sommes qui y sont stockées le soient aussi. L’intérêt d’avoir une telle construction aux Bahamas est qu’on paye 0% d’impôt sur le revenu pas plus que de droit de succession.
L’ex-groupe belgo-français Dexia apparaît encore dans cette nouvelle affaire, via sa filiale Experta, comme lors de la première fuite sur les sociétés panaméennes, Panama Papers. Et il semble que le rôle du groupe Dexia dans le monde offshore soit encore plus important que ce l’on pensait initialement. Dans les paradis fiscaux, les « agents enregistrés » sont le point de contact officiel entre les compagnies offshore et le gouvernement. C’est ce rôle-là que jouait le désormais fameux cabinet d’avocat Mossack Fonseca au centre des Panama papers. Aux Bahamas on aurait retrouvé encore 538 autres « agents enregistrés ». Dans les 1.3 million de documents des Bahamas papers, le terme Experta revient pas moins de 757 fois. Plus compromettant encore, il y a une lettre du 28 mars 2008 qui a fuité et qui révèle une liste de 176 compagnies offshores pour lesquelles Experta apporte une contribution de 350 dollars par an et par entreprises. Le nom de Experta Trust Company (Bahamas) Limited se retrouve lui dans le rapport annuel de de Dexia en 2005. Cette compagnie a depuis été rachetée par Equity Bank And Trust Bahamas Limited.
BIO
En outre, deux administrateurs belges siègent dans la même société bahaméenne (CaseIF Corporation II Limited) et y représentent leur employeur, BIO, soit la Société belge d’investissement pour les pays en développement. Caseif Corporation II Ltd investit dans de petites entreprises en Amérique centrale qui n’ont que peu ou pas accès au financement à long terme. La création de Bio en 2001 a été financée à moitié par l’état belge. En 2012, 11.11.11 annonçait que près de 111 millions du budget belge pour le développement passaient via Bio dans des paradis fiscaux. Ce qui était néfaste pour les pays en développement stipulait le consortium à l’époque, car du coup ces pays perdaient une part des revenus qui leur étaient dus. La réponse du patron de Bio, Hugo Bosmans, avait alors été que dans ces pays les infrastructures financières étaient pratiquement inexistantes et que les institutions étatiques étaient peu fiables.
Une commission parlementaire a vu le jour et une nouvelle loi a été publiée signifiant que les fonds placés dans les paradis fiscaux ne pouvaient plus servir pour BIO.
Deux ans et demi plus tard, les Bahamas papers révèlent que BIO a encore des parts dans des paradis fiscaux, puisqu’elle fait encore partie du comité de direction du fond [Caseif Corporation II Ltd]. Il devrait mettre fin à cette collaboration, en accord avec les autorités belges pour la fin 2017. Il lui reste encore 5 investissements dans des paradis fiscaux. Il s’agit de montant évalué à 14,9 millions d’euros sur un portefeuille global de 414,3 millions en euro et de 130 investissements. Lire la suite.