La Françafrique aux arrêts ?
21 janvier 2001 par Survie
Des affaires françaises, des affaires africaines. Des noms connus, d’autres moins. Juste à la fin du millénaire, c’est un beau morceau de la Françafrique qui a été visé, perquisitionné ou mis en examen, voire écroué par les juges Armand Riberolles, Marc Brisset-Foucault, Philippe Courroye et Isabelle Prévost-Desprez : Michel Roussin, Pierre Falcone, Arcadi Gaydamak, Jean-Charles Marchiani, Charles Pasqua, Bernard Poussier, Jean-Christophe Mitterrand, Jean-Noël Tassez - tandis que le juge Renaud van Ruymbeke relançait la traque du fugitif Alfred Sirven, via de présumés complices de sa cavale, Jean-Marie Lapierre, ancien mercenaire de Bob Denard, et Lionel Queudot.
[…] 1. Michel Roussin
Pourquoi commencer par l’organisateur des circuits financiers milliardaires de Jacques Chirac , l’aiguilleur du financement occulte des partis politiques ? Certes, il a été le premier épinglé, à propos d’une bagatelle : 600 millions de racket des marchés publics. Mais ne s’agit-il pas des lycées d’Île-de-France ?
En réalité, le personnage et ses circuits financiers débordent très largement Paris, sa région, et même l’Hexagone. Une partie des ponctions sur les budgets de la capitale était blanchie via plusieurs pays d’Afrique : la Côte d’Ivoire (avec l’inénarrable Yanni Soizeau, “traité” par un proche de Roussin, Philippe Jehanne ), le Congo-Brazzaville, probablement le Cameroun… En Suisse, sur les comptes de sociétés fiduciaires basées en divers paradis fiscaux, l’argent des rackets français se mêlait aux énormes caisses noires d’Elf, aux rétro-commissions sur les ventes d’armes, etc. Ce n’est pas par hasard que Michel Roussin, ex-numéro 2 de la DGSE, ancien ministre de la Coopération, est devenu le “Monsieur Afrique” du patronat (Medef) et du groupe monopolistique Bolloré.
[…] En plus de ses états de Services, Michel Roussin a été successivement orchestrateur financier de la Chiraquie, ministre de la Coopération, PDG d’une entreprise de construction (SAE International, devenue Eiffage), dans l’orbite de Paribas. En 1997, il cumulait cette fonction avec la présidence du comité Afrique du patronat français, la délégation de la Francophonie à la mairie de Paris, et une candidature avouée à la présidence d’Elf… Si l’on ajoute une touche présumée de GLNF (Grande Loge nationale française) , on respire un puissant bouquet françafricain. Roussin a d’ailleurs « son propre petit groupe de fidèles, discrets, placés à des endroits stratégiques du village franco-africain ». Parmi eux, le très proche Jean-Yves Ollivier. Ce personnage majeur de la Françafrique est un pivot des Services, depuis le contournement de l’apartheid jusqu’à la recolonisation du Congo-Brazzaville, en passant par la mercenarisation des Comores ; il aurait aussi été l’officier traitant de Sirven, et aurait organisé sa fuite. Roussin peut encore compter sur l’ex-colonel de la DGSE Jean-François Charrier, attentif à la riche Nouvelle-Calédonie, aux Comores et à Madagascar. Lire la suite.