La banque suisse Lombard Odier inculpée dans les détournements de fonds par la fille de l’ex-président Ouzbek

Vendredi 29 novembre 2024

Agence France-Presse 29 novembre 2024 à 13h56

La banque suisse Lombard Odier et un ancien employé ont été inculpés pour blanchiment d’argent aggravé, le bureau du procureur en Suisse lui reprochant des défaillances qui ont joué un rôle « déterminant » pour aider la fille de l’ancien président ouzbek à dissimuler des fonds.

La banque genevoise rejette toutefois « fermement » ces allégations « infondées », insistant sur le fait que l’enquête avait commencé lorsqu’elle avait, de manière « proactive », fait part de ses soupçons à l’autorité en Suisse chargée de la lutte contre le blanchiment d’argent, affirme-t-elle dans un communiqué.

Vendredi, le Ministère public de la Confédération (le bureau du procureur en Suisse) a annoncé dans un communiqué avoir déposé un acte d’accusation le 26 novembre auprès du Tribunal pénal fédéral, mettant en cause des failles dans les systèmes de contrôle de la banque qui ont empêché de détecter les agissements d’un ancien employé impliqué dans les transferts de fonds venant d’une structure appartenant à Gulnara Karimova.

Cette mise en accusation s’inscrit dans le cadre d’une enquête qui avait déjà amené le bureau du procureur à déférer Mme Karimova, la fille aînée de l’ex-président Islam Karimov, ainsi qu’un autre prévenu devant le Tribunal pénal fédéral en septembre 2023, précise le communiqué.

En mars 2020, Gulnara Karimova a été condamnée dans son pays à un peu plus de treize ans de prison pour extorsion et détournement de fonds. La Suisse avait de son côté gelé en 2012 quelque 800 millions de francs suisses (859 millions d’euros à taux actuels), puis ouvert une enquête en 2014.

  • Faux ayants droits -

Dans le communiqué publié vendredi, le bureau du procureur estime que l’ancien employé, lui aussi inculpé, connaissait la fille de l’ancien président de la République d’Ouzbékistan et plusieurs membres de la structure abritant les fonds avant même d’être recruté par Lombard Odier en 2008 comme gestionnaire.

Il aurait alors « maintenu un contact actif » avec des membres de cette structure et aidé entre août 2008 et août 2012 à ouvrir des comptes « destinés à recevoir des fonds issus de crimes commis par cette organisation », détaille le communiqué.

Il aurait ensuite géré ces comptes en désignant de « faux ayants droit économiques », ce qu’il « n’aurait pas signalé au sein de la banque » tout en sachant que « la réelle et unique ayant droit économique des fonds était Gulnara Karimova ».

Cet ancien employé aurait aussi « faussement » qualifié une entreprise « d’opérationnelle » alors qu’il savait qu’elle n’avait ni employé, ni activité et avait été créée uniquement pour « donner un habillage juridique aux transferts de fonds ». Il aurait également permis à une personne qui n’avait pas de droits d’accès de déplacer des documents dans des coffres-forts, d’après le bureau du procureur.

La banque avait fini par avoir des soupçons et avertir l’autorité helvétique chargée des questions de blanchiment d’argent.

Le bureau du procureur lui reproche toutefois de « multiples défaillances » qui ont empêché de détecter et éviter les activités de blanchiment d’argent « répétées et durables » commises par ce gestionnaire.

« Nous avons pris note de la décision du Ministère public de la Confédération d’engager des poursuites », a réagi la banque genevoise dans un communiqué.

« Les allégations sont infondées et fermement rejetées par la Banque », estime cependant Lombard Odier, qui a tenu à rappeler que l’enquête avait débuté quand la banque avait, elle-même, fait part de ses « soupçons aux autorités suisses » en 2012.

Agence France-Presse

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