« Le secret bancaire doit être aboli en matière fiscale pour éviter la criminalité »

Samedi 5 avril 2008 — Dernier ajout samedi 3 juin 2017

ECONOMIE : « Le secret bancaire doit être aboli en matière fiscale pour éviter la criminalité »

Date de parution : Samedi 5 avril 2008

Auteur : Willy Boder

FISCALITE. Laszlo Kovacs, commissaire européen aux Finances, explique comment il entend combattre l’évasion.

Extraits de l’article publié sur le site internet du journal Le Temps :

Le Temps : Quels sont les objectifs de la révision de la directive sur l’imposition du revenu de l’épargne ?

Laszlo Kovacs : Lorsqu’elle est entrée en force en juillet 2005, tout le monde était conscient des nombreuses failles de cette directive. Il a donc été décidé qu’elle devrait être révisée après trois ans. Un rapport intermédiaire sera déposé le mois prochain et un rapport final plus tard. Il s’agit d’abord d’étendre la liste des produits financiers touchés par une obligation d’échange d’informations fiscales et accessoirement par une imposition à la source. Actuellement, seuls les dépôts bancaires traditionnels tombent sous le coup de la directive. Notre projet consiste à inclure d’autres formes d’épargne comme les actions, les fonds de placement, les fonds d’investissement et les fondations.

  • Effectivement, le cas liechtensteinois a donné de l’élan au dossier de la révision. L’évasion fiscale opérée par le directeur de la Poste allemande a mis en évidence des failles que nous connaissions. Plusieurs Etats membres de l’Union européenne (UE) doutent en outre de l’efficacité de la taxation à la source des revenus de l’épargne.
  • Voulez-vous également réviser cette partie de la directive ?
  • Trois membres, la Belgique, l’Autriche et le Luxembourg, ont refusé, en 2005, la procédure d’échange d’informations fiscales […]
  • Un revenu est un revenu, et tout revenu doit être imposé. Je me pose la question des vraies motivations des personnes qui acceptent de renoncer jusqu’à hauteur de 35% au revenu de leur épargne pour éviter que leur nom soit communiqué aux autorités fiscales de leur pays de domicile. Le taux moyen dans les Etats membres étant de 20%, ces mouvements de fonds doivent être en relation avec de l’argent gagné de manière illégale.
  • En quoi la Suisse est-elle concernée par ce dossier ?
  • La directive s’applique aux 27 pays de l’UE. Mais aussi à cinq pays non membres, dont la Suisse, le Liechtenstein et Monaco, et à dix territoires extérieurs comme les îles anglo-néerlandaises. Ces derniers ont tous choisi le système de l’imposition à la source à la place de l’échange d’informations.
  • Oui, en ce qui concerne le domaine fiscal. Je suis en faveur de l’échange complet d’informations à des fins fiscales dans le but d’éviter toute activité criminelle. Et j’entends par activité criminelle aussi bien l’évasion fiscale que la fraude fiscale.
  • En 2005, vous aviez pourtant déclaré accepter sans problème le secret bancaire…
  • A l’époque, c’était une réalité incontournable. Je constate aujourd’hui que la tendance des Etats membres à vouloir changer les règles est beaucoup plus forte.
  • Le devoir de l’UE n’est-il pas de convaincre d’abord la Belgique, l’Autriche et le Luxembourg de changer de système ?
  • Certainement, mais la directive concerne aussi la Suisse. Je constate par ailleurs, par des contacts informels, que la Belgique semble prête à revoir sa position. Je ne l’aurais jamais parié il y a trois mois. Si la Belgique franchit le pas, pourquoi devrais-je penser qu’une telle évolution est impensable en Autriche et au Luxembourg ?
  • Pourquoi considérez-vous la Suisse comme un paradis fiscal alors qu’elle ne figure pas sur la liste de l’OCDE comprenant Andorre, le Liechtenstein et Monaco ?
  • L’OCDE est seule responsable de cette liste. Mais je ne comprends pas pourquoi l’OCDE ne considère pas la Suisse comme un paradis fiscal au même titre que le Liechtenstein ou Monaco. Quant à moi, je ne fais pas de différences.
  • Quelle est l’utilité de boucher toutes les failles européennes si les fortunes filent vers des paradis fiscaux asiatiques ?
  • Je suis d’accord avec vous. C’est pour cela que le troisième volet, en parallèle à la révision de la directive sur la fiscalité de l’épargne, concerne des entretiens, aujourd’hui au niveau exploratoire, avec Singapour, Hongkong et Macao.
  • La fraude à la TVA est estimée à 250 milliards d’euros par an. A supposer que quelques centaines de millions échappent au fisc européen à cause du secret bancaire suisse, n’est-ce pas dérisoire ?
  • Il n’y a aucune corrélation entre les dossiers fiscalité de l’épargne et TVA. Une journée comporte 24 heures et je peux parfaitement m’occuper intensivement des deux.
  • Le 8 avril, une délégation européenne se rend à Berne pour parler du privilège fiscal accordé aux holdings…
  • Ce dossier n’est pas sous ma responsabilité directe, mais le but est évidemment de convaincre la Suisse de modifier sa législation en la matière.

Lire l’intégralité de l’article sur le site du journal Le Temps.

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