Enquête financière
Le compte « opaque » de Juan Carlos Ier en Suisse
Par Andrea Ornelas Ce contenu a été publié le 9 mars 2020 15:35
La justice genevoise a ouvert une enquête sur l’origine de 100 millions de dollars versés sur un compte de l’ancien roi d’Espagne Juan Carlos 1er auprès d’une banque privée genevoise. Cette enquête pour « soupçon de blanchiment d’argent aggravé » relance un vieux débat : les banques en font-elles assez pour connaître la légalité des fonds des leurs clients « sensibles » ?
Le roi émérite Juan Carlos 1er possède-t-il un compte non déclaré en Suisse ?
Le quotidien La Tribune de Genève a révélé la semaine dernière que le procureur genevois Yves Bertossa a commencé à enquêter en 2018 sur un don d’environ 65 millions de dollars fait par la Fondation Lucum, basée au Panama, à Corinna Larsen par l’intermédiaire de la banque privée Mirabaud.
Cette donation, qui a eu lieu en 2012, suscite la controverse, car l’ancien roi serait le seul bénéficiaire du compte de la fondation. Par ailleurs, la bénéficiaire du don, l’entrepreneuse d’origine danoise Corinna Larsen, serait une ancienne maîtresse de Juan Carlos.
Quel est le problème de ces fonds ? Est-il interdit à l’ex-monarque de recevoir ou de faire des dons ?
Les banques suisses sont tenues d’appliquer des mesures strictes de diligence raisonnable pour s’assurer que les transactions de leurs clients fortunés ont toujours une origine légale. En outre, il existe des protocoles de reconnaissance supplémentaires pour les personnes politiquement exposées.
Dans le cas présent, cet argent a attiré l’attention du procureur Bertossa, car il ne provient pas d’un compte bancaire espagnol déclaré par Juan Carlos Ier, mais du compte d’une fondation panaméenne dont le patrimoine originel, estimé à 100 millions de dollars, provenait d’une donation faite en 2008 par Abdala bin Abdulazis, roi d’Arabie saoudite aujourd’hui décédé.
Pourquoi le roi d’Espagne aurait-il reçu un don si important de l’Arabie saoudite ?
Le procureur Bertossa enquête pour déterminer si cet argent est lié à la construction par des entreprises espagnoles d’une ligne de train à haute vitesse entre Médine et La Mecque. Les sociétés espagnoles auraient pu être favorisées grâce à l’intervention de l’ancien roi d’Espagne.
Cette hypothèse découle des révélations faites par Corinna Larsen dans des enregistrements clandestins réalisés par l’ancien commissaire espagnol José Manuel Villarejo. Elle y déclare que Juan Carlos Ier aurait reçu une compensation financière pour son intervention et qu’il aurait géré ces fonds par l’intermédiaire d’hommes de paille avec des comptes à l’étranger. Lire la suite.