10 janvier 2002 - 08:19
L’affaire Borodine éclabousse la Suisse
Légende photo : Pavel Borodine. (swissinfo)
Témoin-clé, Felipe Turover affirme que sa vie est en danger. Il accuse la Suisse devant la Cour européenne des droits de l’homme.
Le nom de Felipe Turover apparaît pour la première fois dans la presse occidentale en août 1999. Cet homme d’affaires de 35 ans, vivant en Russie et de nationalité espagnole, dénonce « le clan Eltsine » coupable d’avoir volé des dizaines de millions de dollars au budget de l’Etat.
Fils de Républicains espagnols réfugiés en Russie, cet homme élégant et polyglotte (il parle également français, anglais et italien) affirme avoir travaillé en 1992 sur la dette russe avec les principaux créanciers de l’ex-URSS, notamment les banques suisses.
A cette époque, il aurait découvert que la société tessinoise Mabetex, chargée de grands travaux au Kremlin, aurait aidé le clan Eltsine à blanchir de l’argent.
Les accusations de Felipe Turover ont déclenché une vaste enquête au Tessin et à Genève, débouchant sur les inculpations de Pavel Borodine, l’ex-intendant du Kremlin, et de Beghjet Pacolli, le patron de la Mabetex.
Domicilié dans des hôtels de luxe
« Comment expliquer qu’une petite société comme Mabetex ait pu obtenir la restauration de monuments historiques en Russie ? »,interrogeait-il. Après ses « révélations », Felipe Turover avait préféré quitté précipitamment Moscou. Depuis, il habite le plus souvent en Suisse, de préférence dans des hôtels de luxe.
Depuis plusieurs mois, l’homme d’affaires dénonçait l’attitude de Carla Del Ponte, l’ancien procureur de la Confédération. Celle-ci, affirme-t-il, aurait violé son devoir de fonction, mettant ainsi son existence en danger.
« Ma vie a basculé et j’ai développé des tendances suicidaires », déclarait-il en déposant une plainte pénale contre Carla Del Ponte.
En juin 2001, le Ministère public de la Confédération ne donnait pas suite à sa plainte. Felipe Turover se tourne donc vers la Cour européenne des droits de l’homme à Strasbourg.
Il reproche cette fois aux autorités helvétiques de ne pas avoir pris en sa faveur des mesures de protection. Ses « révélations » lui vaudraient des menaces de la part de la mafia russe.
L’homme d’affaires, qui possède la double nationalité, israélienne et espagnole, souffre également d’être retombé dans l’anonymat. Pendant des mois, la presse internationale, et notamment le quotidien italien Corriere della Sera, consacraient leurs premières pages à ses déclarations.
A présent, les affaires russes n’intéressent plus grand monde. Un projet de livre sur son histoire a même été abandonné.
Ian Hamel