De la prison ferme requise contre Pascaline Bongo

Jeudi 1er février 2024

Le parquet national financier (PNF) a requis jeudi trois ans de prison dont un an ferme et une amende de 150.000 euros à l’encontre de Pascaline Bongo, jugée à Paris pour corruption passive d’agent public étranger au début des années 2010.

Agence France-Presse 1 février 2024 à 17h28

« La gravité des faits justifie que des peines d’emprisonnement soient prononcées », avaient prévenu les procureurs du PNF dans leur réquisitoire à deux voix devant le tribunal correctionnel.

Tout de noir vêtue, un foulard bleu ciel autour du cou, la fille aînée du défunt président gabonais Omar Bongo, âgée de 67 ans, a accueilli les réquisitions avec un soupir avant de se tourner vers ses proches, nombreux dans la salle d’audience de la 32e chambre.

Mme Bongo a « usé de ses fonctions pour monnayer ses pouvoirs », ont affirmé les procureurs. « Inspecteur des finances de profession, Mme Bongo a délibérément manqué à ses devoirs d’intégrité et de probité », ont-ils ajouté.

Pascaline Bongo est soupçonnée par le PNF d’avoir accepté d’intervenir en faveur de la société française Egis Route dans l’attribution de marchés publics contre la promesse de 8 millions d’euros de rétrocommission.

Contre les autres prévenus - la société d’ingénierie française Egis, trois de ses anciens cadres supérieurs, l’homme d’affaires gabonais Franck Ping et l’avocate Danyèle Palazo-Gauthier, amie et ex-conseil de Mme Bongo -, le parquet a requis des peines de deux à trois ans de prison entièrement assorties du sursis et des peines d’amende de 50.000 à 150.000 euros concernant les personnes physiques et 750.000 euros d’amende pour l’entreprise, contre laquelle il a été également demandé une interdiction de candidater pour des marchés publics pendant cinq ans.

Les cadres d’Egis Route sont poursuivis pour corruption active. M. Ping et Mme Palazo-Gauthier doivent répondre de complicité de corruption passive.

Les avocats de la défense ont demandé la relaxe de leurs clients. Au début du procès, ils avaient plaidé pour la nullité de la procédure, arguant notamment de la prescription des faits reprochés aux prévenus ou de l’incompétence, selon eux, du tribunal pour juger une affaire « gabonaise ».

« C’est une histoire folle », s’est indignée le conseil de Mme Bongo, Me Corinne Dreyfus-Schmidt, tandis que l’avocat de Mme Palazo-Gauthier, Me Cédric Labrousse, a dénoncé des réquisitions « politiques ».

  • « Pacte de corruption » -

Lors de son interrogatoire devant le tribunal mercredi, Pascaline Bongo avait catégoriquement nié les soupçons de corruption qui pèsent sur elle. « A aucun moment je n’ai envisagé de trouver des marchés publics », a-t-elle dit à la barre.

Elle avait expliqué que sa fonction de « Haute représentante personnelle du président de la République », obtenue quand son frère Ali (renversé par un coup d’Etat en août dernier) a été élu président en octobre 2009, était purement « honorifique » et qu’elle n’avait pas pouvoir pour négocier des contrats de travaux publics.

Elle a cependant reconnu avoir rencontré des représentants d’Egis Route dans son bureau au Palais présidentiel de Libreville fin novembre 2009 mais, affirme-t-elle, juste pour se faire présenter cette société.

A l’époque, elle avait créé la société Sift, une « coquille vide » selon ses propres mots. Sift n’avait aucune activité ni même de bureau ou d’employé, hormis son administratrice Pascaline Bongo.

Sift a néanmoins signé avec Egis un partenariat aux termes duquel « la coquille vide » pouvait prétendre à plus de 5 milliards de francs CFA en cas de succès (environ 8 millions d’euros), si elle leur faisait attribuer le marché de consultant associé à la création de l’Agence nationale des grands travaux (ANGT) du Gabon.

« Egis n’a pas contracté avec Sift mais avec Mme Bongo (…). Sift était une façade en vue de l’intervention personnelle de Pascaline Bongo », ont soutenu les procureurs.

« Sift n’avait aucune logique économique sinon de dissimuler un pacte de corruption », ont-ils résumé.

Le procès doit s’achever dans la soirée.

Agence France-Presse

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